Histoire drôle : Nathalie Sarraute et le docteur



Daumier, Le malade imaginaire (1862)
Puisque le récit Bref est au programme, Marcel s’abandonne à sa passion favorite : l’histoire drôle qui ne fait rire que lui.

On trouve celle-ci dans « Ce que je cherche à faire », communication prononcée par Nathalie Sarraute dans le cadre du colloque de Cerisy consacré au nouveau roman en 1971. Sarraute est partie au bout d’une journée, tant les préoccupations des autres « nouveaux romanciers » lui paraissaient loin des siennes. Elle est en effet justement convaincue que quelque chose (perception immédiate, sensation...) préexiste au mot et elle travaille à faire passer cet innommé dans l’univers du langage. Or, l’époque se vouant exclusivement aux « signifiants et leurs rapports », ceux qui osent même timidement suggérer qu’il existe quelque chose en dehors du langage se font immédiatement rabrouer, d’où : 
Je me suis trouvée dans la situation de cet homme qui tombe évanoui et percevant à travers le brouillard qui l’enveloppe que le médecin appelé à l’examiner déclare qu’il est mort, rassemble ses forces, ouvre un œil, balbutie : « Mais je ne suis pas mort » et se voit vertement remis à sa place - de mort - par sa femme qui lui dit : Tais-toi donc. Le docteur le sait mieux que toi. »
Nathalie Sarraute, « Ce que je cherche à faire », Œuvres complètes, bibliothèque de la Pléiade, p. 1699

Commentaires

Articles les plus consultés